par LAURENT HERROU, le lundi 8 mai 2006
J’ai commencé à écrire la page du 8 le dimanche après-midi alors que le lundi n’avait encore rien eu à offrir. On sortait du cinéma, on avait vu “Transamerica”, il y avait des filles qu’on connaissait à la sortie, qui m’avaient demandé ce que j’en avais pensé puisqu’elles allaient voir la même chose à la séance suivante, j’avais refusé de leur répondre, elles avaient demandé : on ne va pas s’emmerder quand même? J’avais secoué la tête, expliqué que je n’aimais pas raconter un film comme je n’aimais pas qu’on me raconte, juste avant de rentrer dans la salle. Les filles avaient été d’accord, on était passé à autre chose, le boulot que l’une d'elles allait peut-être décrocher le lendemain dans une librairie de Nice, c’est à ce moment-là que ma tête s’est mise à cogner. Je suis sorti du cinéma, la lumière était encore très blanche. Le matin au café, j’avais été ébloui par le soleil, je ne parvenais pas à garder les yeux ouverts, j’avais demandé qu’on change de table, Jean-Pierre avait dit à Benoît que c’était tous les jours comme ça, à chaque fois une surprise, un mouvement de caractère, un inconfort. Il a demandé ce qui n’allait pas dans la rue devant le cinéma, j’ai répondu que j’avais un mal de tête soudain, il a trouvé ça bizarre, je savais que j’étais en train d’écrire, la machine s’emballait. On est remonté vers la maison, on est arrivé vers huit heures et quart, j’ai vérifié les mails, ajouté une photo à mon profile sur myspace.com -j’avais dû m’y inscrire pour pouvoir voir les vidéos de Kuta et de Sophie Moleta, qui au final, n’étaient pas encore en ligne. Jean-Pierre a noté que mon mal de tête n’allait pas s’arranger si je passais encore une heure devant l’écran de l’ordinateur, je lui ai répondu un peu sèchement qu’on n’avait le temps de rien, on sortait du ciné, il y avait la série “FBI portés disparus” à la télé à suivre dans quelques minutes, on n’avait pas eu le temps de manger, Jean-Pierre proposait de faire la cuisine tout en regardant le feuilleton, je me suis étendu dans l’obscurité de la chambre, les yeux injectés de sang, j’ai pris ma tête dans les mains en espérant que ça allait passer, Jean-Pierre a proposé une aspirine, j’avais avalé deux Dafalgan dans la salle de bains, j’ai été encore une fois un peu sec, il m’a demandé en riant de ne pas l’engueuler, je me suis mis à rire, désolé à mon tour, il a dit : si on ne voit pas “FBI”, ce n’est quand même pas la fin du monde. On a dîné devant la télé, je lui racontais ce qui se passait sur l’écran tandis qu’il réchauffait du lapin dans la cuisine. On est allé se coucher tout de suite après, il n’y avait pas de mails significatifs, je crois qu’on était crevé de la journée, sans raison, le temps avait pesé sur notre humeur, la menace de pluie qui ne se concrétisait pas et le plafond bas et lumineux des nuages, pour moi le dimanche n’avait existé que comme un prétexte à la page du lundi, cela faisait longtemps que je n’avais pas exercé sur moi-même une telle pression, j’ai eu un mal fou à m’endormir, je me suis réveillé dix fois dans la nuit, chaque réveil était l’occasion d’une première phrase brillante pour la page du lundi, quand le jour a enfin été là, je me suis levé le premier, ce qui n’arrive presque jamais, je suis passé sous la douche, j’ai préparé le petit-déjeuner, Jean-Pierre s’est levé à son tour, on a déjeuné, il a proposé un cinéma dans la matinée et devant ma mine un peu froissée, il a compris qu’il y avait une autre priorité.
J’ai rejoint le journal.copyright laurent herrou
photo/copyright jean pierre paringaux
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