par LAURENT DE SUTTER, le dimanche 11 juin 2006
Dans le dernier volume de ses Exorcismes spirituels, Philippe Muray se moquait cruellement de ces écrivains invités à tenir pour une semaine leur journal intime dans les pages d’un journal. Il pensait bien sûr à Libération. En effet, notait-il, ces écrivains ne trouvent en règle générale pas d’autre réponse à la commande qui leur est faite qu’acheter un journal et se mettre à commenter l’actualité. Aux yeux de Philippe Muray, rien n’était plus vain que ce commentaire : il ne faisait que redoubler par le vide d’une conscience d’écrivain concerné le vide d’une actualité qui ne vit précisément que de l’énergie de tous ceux qui, de fait, se sentent concernés par elle. Pour Philippe Muray, c’était exactement l’inverse qu’il fallait pratiquer pour produire quelque chose d’intéressant. Il fallait se désolidariser de cette actualité. S’en désolidariser sans reste.
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Un appartement derrière le marché de la place de Torcy. Du balcon, on aperçoit les hauts immeubles de la Porte de la Chapelle. C’est la nuit, il fait chaud. Il y a des garçons et des filles qui boivent du champagne en rigolant. Parfois, la musique (de la samba de Bahia) leur fait esquisser un mouvement d’épaule ou de hanche. L’heure tourne. En somme : une soirée d’été comme les autres. Mais ce n’est pas encore l’été ? Tant mieux.
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Gilles Deleuze était optimiste. Aux périodes pauvres succèdent toujours des périodes riches, disait-il. Nous vivons dans une période pauvre ? Soit. Faisons comme le sage chinois : attendons que la situation se transforme. Face à la nullité, l’irritation est inutile. Il suffit d’être patient. L’acharnement de la nullité à vouloir paraître contemporaine la périmera plus sûrement que toute entreprise délibérée pour l’anéantir.
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Il y a peu, Louis Skorecki évoquait dans Libération le film que Otto Preminger avait tiré de Bonjour tristesse. Il en profitait pour tirer un coup de chapeau à Frédéric Beigbeder. Il y a chez ce garçon un peu de Sagan, écrivait-il, c’est un très bonne raison pour l’aimer. Et il ajoutait : il a également pris sa défense alors que tout le monde la méprisait ou l’avait oubliée, c’en est une seconde. Oui, on se rendra compte un jour que Frédéric Beigbeder était un grand écrivain. Comme on s’est rendu compte, mais trop tard, que Sagan l’était.
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Un appartement derrière le marché de la place de Torcy. Du balcon, on aperçoit les hauts immeubles de la Porte de la Chapelle. C’est la nuit, il fait chaud. Il y a des garçons et des filles qui boivent du champagne en rigolant. Parfois, la musique (de la samba de Bahia) leur fait esquisser un mouvement d’épaule ou de hanche. L’heure tourne. En somme : une soirée d’été comme les autres. Mais ce n’est pas encore l’été ? Tant mieux.
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Gilles Deleuze était optimiste. Aux périodes pauvres succèdent toujours des périodes riches, disait-il. Nous vivons dans une période pauvre ? Soit. Faisons comme le sage chinois : attendons que la situation se transforme. Face à la nullité, l’irritation est inutile. Il suffit d’être patient. L’acharnement de la nullité à vouloir paraître contemporaine la périmera plus sûrement que toute entreprise délibérée pour l’anéantir.
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Il y a peu, Louis Skorecki évoquait dans Libération le film que Otto Preminger avait tiré de Bonjour tristesse. Il en profitait pour tirer un coup de chapeau à Frédéric Beigbeder. Il y a chez ce garçon un peu de Sagan, écrivait-il, c’est un très bonne raison pour l’aimer. Et il ajoutait : il a également pris sa défense alors que tout le monde la méprisait ou l’avait oubliée, c’en est une seconde. Oui, on se rendra compte un jour que Frédéric Beigbeder était un grand écrivain. Comme on s’est rendu compte, mais trop tard, que Sagan l’était.
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